Marseille 1871 : une autre Commune
Marseille 1871 : une autre Commune
Le Monde illustré, 8 juillet 1871.
Carte postale ancienne

Charles Cartoux
Au public marseillais, au conseil de guerre siégeant à Marseille (1871)

Proclamations et avis de la Commission départementale portant le nom de Cartoux

Les Voix du peuple (1868). Impressions d’un condamné à mort (1871)

La première proclamation de la Commission départementale du 23 mars 1871 porte les noms de douze membres, dont ceux des trois délégués du Club républicain de la garde nationale : Barthelet, Bouchet et Cartoux

Proclamation de la Commission départementale provisoire des Bouches-du-Rhône, 23 mars 1871 

« république française
Liberté, Égalité, Fraternité
Préfecture des Bouches-du-Rhône 

 

La Commission départementale provisoire aux habitants de Marseille et des Bouches-du-Rhône

 Citoyens,

Une collision sanglante allait éclater parmi nous. La guerre civile était prête à sortir des circulaires et des provocations irritantes qu’un pouvoir aveugle lançait comme un défi aux grandes cités. Nous sommes intervenus.

Grâce à l’union de tous les groupes républicains, nous avons vu se dissiper le malentendu qui menaçait d’armer les uns contre les autres, dans une lutte fratricide, ajoutée à tant d’autres désastres, les citoyens d’une même ville, les soldats d’une même cause.

Nous avons parlé d’apaisement, de conciliation – Marseille a répondu à notre appel par une manifestation imposante. Il n’a pas été versé une seule goutte de sang – on espérait nous diviser en deux camps. Marseille a été unanime à déclarer qu’elle soutiendrait le gouvernement républicain régulièrement constitué qui siégerait dans la capitale.

Et par là, nous avons tous ensemble affirmé du même coup notre amour pour la République, pour l’héroïque capitale martyre, qui, à elle seule aurait sauvé notre patrie, si notre patrie avait dû être sauvée.

Après avoir échappé au danger, à force de patriotisme et de sagesse, Marseille ne pouvait plus avoir confiance dans l’administration préfectorale. L’opinion publique exigeait une satisfaction.

Le Conseil municipal, avec le concours de tous les groupes ré­publicains de la cité a dû instituer une Commission départemen­tale, chargée d’administrer provisoirement le département des Bouches-du-Rhône et la ville de Marseille.

Les membres de cette Commission provisoire se sont mis immédiatement à l’œuvre. Ils comptent sur votre concours et votre confiance.

Maintenez avec nous l’ordre dans la cité, retournez paisiblement à vos travaux ; que le commerce et que l’industrie reprennent promptement l’essor pacifique qui doit contribuer au relèvement de notre patrie.

Nous veillons jour et nuit sur la République, jusqu’à ce qu’une autorité nouvelle, émanée d’un gouvernement régulier siégeant à Paris, vienne nous relever de nos fonctions.

Vive Paris ! Vive La République !

Marseille, le 23 mars 1871.

Les membres de la Commission provisoire du département des Bouches-du-Rhône : Gaston Crémieux. Étienne père. Job. Bosc, Desservy, Sidore, conseillers municipaux. Maviel. Allerini. Guellard. Barthelet. Émile Bouchet. Cartoux. [1] »

Après que dans la nuit du 27 au 28 mars 1871, le Conseil municipal ait confirmé le retrait de ses délégués de la Commission départementale et que le Club républicain de la garde nationale en ait fait autant, les délégués de ce club rédigeaient à leur tour le 28 mars, en leurs propres noms, une lettre ouverte exprimant leur regret de ne plus pouvoir siéger dans cette Commission. Cette lettre porte les noms des trois délégués en signalant que l’un d’eux, Cartoux, est absent ; il était effectivement encore à Paris et ne sera de retour à Marseille que le lendemain, le 29 mars.
Notons aussi que les signataires de ce courrier ne cautionnent pas leur retrait ; ils laissent en effet la porte ouverte à la possibilité d’être appelés par d’autres groupes républicains.

Lettre des anciens délégués du Club républicain de la garde nationale à leurs concitoyens, 28 juin 1871

« La lettre suivante a été adressée aux membres de la Commission départementale :

Marseille, mardi 28 mars, 1 h. 40 m. du matin.

Chers concitoyens,

Le Club républicain de la garde nationale, en présence de l’attitude regrettable du Conseil municipal, nous retire nos pouvoirs de délégués.

Nous ne pourrions donc désormais siéger parmi vous qu’appelés par d’autres groupes républicains.

Toutefois nous devons vous dire, que nous considérons comme plus sage de voir la commission départementale maintenir la délibération qu’elle a prise à la mairie en laissant au conseil municipal la responsabilité des événements qui vous menacent.

Salut et fraternité,

Fulgéras. E. Bouchet. Cartoux, absent. [2] »

 Un avis des délégués de Paris invitant les gardes nationaux à se réunir, daté lui aussi du 28 mars 1871, porte la mention « Approuvé » et les noms de neuf membres de la Commission départementale : il y manque ceux des trois conseillers municipaux - tandis que ceux des trois délégués du Club républicain de la garde nationale - Fulgeras (qui avait remplacé Barthelet), Bouchet, Cartoux - y figurent encore, indûment.

Avis des délégués de Paris, « approuvé » par les membres de la Commission départementale, 28 mars 1871

« Préfecture des Bouches-du-Rhône – AVIS

En vertu des pouvoirs qui nous sont conférés par la Fédération des gardes nationales du département de la Seine,

Invitons tous les délégués de la garde nationale de Marseille, à bien vouloir se réunir à l’Hôtel de la Préfecture, demain 29 mars à 10 heures du matin, pour s’entendre sur les mesures à prendre, afin d’éviter toutes collision et effusion de sang provoquées par la réaction.

Le Conseil municipal, issu du suffrage universel, a des droits que nous respectons, mais la garde nationale, seule à Marseille comme à Paris, a pour principale mission, en même temps que le maintien de l’ordre dans la cité, la sauvegarde de la République démocratique. Unissons donc nos efforts pour le but commun.

Amouroux. Landeck. Albert MAY. MEGY, délégués de Paris [3].

Marseille, le 28 mars 1871.

Approuvé : Les Membres de la Commission départementale,

Gaston Crémieux. Job. Etienne père. Desservy. Bosc. Sidore. Maviel. Alerini. Guihard. Fulgeras, Bouchet. Cartoux. [4] »

 

[1L’Égalité, 25 mars 1871.

[2L’Égalité, 30 mars 1871

[3Ils sont ici quatre et non trois « délégués de Paris » : outre Amouroux, Landeck et May arrivés à Marseille le 27 mars 1871, ils comptent aussi Mégy (Edmond) également membre de l’Internationale, mais venu personnellement à Marseille depuis le 8 mars.

[4Le Sémaphore de Marseille, 30 mars 1871.

Mise à jour :mercredi 30 avril 2025
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