Gaston Crémieux - Textes choisis
En ce 150e anniversaire des Communes de 1871 de Paris, de Marseille et d’autres villes, on commémorera aussi la disparition du dirigeant de la Commune de Marseille, Gaston
Républicain ardent et humaniste, persuadé que la République sera sociale et européenne, Gaston
Une partie de ses écrits furent réunis huit ans après sa disparition dans ses Œuvres posthumes [1], recueil qui rassemble à la fois des poèmes publiés de son vivant, tel que Les voix du peuple présenté ici, paru pour la première fois en 1868 dans le journal Le Peuple, ainsi que des textes inédits écrits en prison. Le deuxième texte présenté, Impressions d’un condamné à mort, est un récit sous forme de journal qu’il écrivit en prison à partir du 28 juin 1871, jour où il apprit que le conseil de guerre l’avait condamné à la peine de mort, et qu’il clôtura quelques jours avant son exécution.
Au-delà de leurs différences de style et des situations dans lesquels ils furent écrits, ces deux textes s’avèrent, a posteriori, intimement liés ; le premier contenant les aspirations généreuses que Gaston
Victime et héros de la Commune de Marseille, Gaston
L’ouvrage publié par l’avocat Roger Vignaud il y a maintenant dix-huit ans, Gaston
Pour ma part, j’espère pouvoir présenter avant la fin de l’année 2021, dont on ne sait si elle verra la fin de cette cette terrible pandémie, un recueil plus large d’écrits de Gaston
Lorsqu’il mit fin à sa collaboration à l’Égalité le 20 mars 1871, les Marseillais n’avaient encore que de vagues échos sur la Commune de Paris qui avait débuté le 18 mars. Dès qu’ils en furent mieux informés, Gaston
Arrêté dans la nuit du 7 au 8 avril, Gaston
Gaston
Michèle Bitton, septembre 2021
Intro
Gaston Crémieux
En ce 150e anniversaire des Communes de 1871 de Paris, de Marseille et d’autres villes, on commémorera aussi la disparition du dirigeant de la Commune de Marseille, Gaston
Républicain ardent et humaniste, persuadé que la République sera sociale et européenne, Gaston
Une partie de ses écrits furent réunis huit ans après sa disparition dans ses Œuvres posthumes [5], recueil qui rassemble à la fois des poèmes publiés de son vivant, tel que Les voix du peuple présenté ici, paru pour la première fois en 1868 dans le journal Le Peuple, ainsi que des textes inédits écrits en prison. Le deuxième texte présenté, Impressions d’un condamné à mort, est un récit sous forme de journal qu’il écrivit en prison à partir du 28 juin 1871, jour où il apprit que le conseil de guerre l’avait condamné à la peine de mort, et qu’il clôtura quelques jours avant son exécution.
Au-delà de leurs différences de style et des situations dans lesquels ils furent écrits, ces deux textes s’avèrent, a posteriori, intimement liés ; le premier contenant les aspirations généreuses que Gaston
Victime et héros de la Commune de Marseille, Gaston
L’ouvrage publié par l’avocat Roger Vignaud il y a maintenant dix-huit ans, Gaston
Pour ma part, j’espère pouvoir présenter avant la fin de l’année 2021, dont on ne sait si elle verra la fin de cette cette terrible pandémie, un recueil plus large d’écrits de Gaston
Lorsqu’il mit fin à sa collaboration à l’Égalité le 20 mars 1871, les Marseillais n’avaient encore que de vagues échos sur la Commune de Paris qui avait débuté le 18 mars. Dès qu’ils en furent mieux informés, Gaston
Arrêté dans la nuit du 7 au 8 avril, Gaston
Gaston
Michèle Bitton, septembre 2021
Introduction aux Voix du peuple
« Les Voix du peuple » est d’abord paru dans le journal marseillais Le Peuple le 6 mai 1868 avant que Gaston
Lorsque « Les Voix du peuple » fut inclus en 1879 dans les Œuvres posthumes de Gaston Crémieux, ce vers y était également absent, mais il y manquait aussi cinq strophes de quatre vers chacune, soit au total vingt et un vers de moins que la première version parue dans le Peuple. C’est cette première version, la plus longue, qui sera reproduite ici, en y signalant les vers omis dans les versions ultérieures.
Comme la plupart des journaux de son époque, Le Peuple ne comportait que quatre pages très denses et le bas de la première page était souvent dévolu à un feuilleton ou à un poème. « Les Voix du peuple » débute effectivement au bas de la première page de ce journal, mais c’est un long poème et ses 134 alexandrins rimés se poursuivent au bas des deux pages suivantes.
C’est une œuvre poétique classique, typique par son style et son fond des dernières années du Second Empire, une période généreuse, emphatique et solennelle chez les écrivains républicains qui furent nombreux à célébrer le Peuple. C’est aussi un des poèmes les plus aboutis de Gaston Crémieux, autant par sa forme que par son contenu en exprimant ses espérances les plus profondes de Fraternité et de Liberté et sa conviction intime dans la valeur émancipatrice de l’instruction du peuple.
« Les Voix du peuple » et les autres poèmes que Gaston Crémieux publia à Marseille en 1868 sont postérieurs de douze ans à sa première poésie connue, « Mes étrennes à L. », incluse également dans ses Œuvres posthumes où elle est datée de janvier 1856. Entre temps il avait publié deux petites plaquettes de poésie à Nîmes en 1857 et 1859 : Mon cadeau de noces : à ma cousine Léonie Vidal, à mon cousin Esdras Crémieux, à mon oncle Hippolyte Vidal, et À l’Italie. Cent vers [10].
Ultérieurement c’est à Marseille qu’il fit imprimer en 1869 le monologue en vers Robespierre. Le 21 janvier 1793 dédié à Léon Gambetta et Alphonse Esquiros [11], les deux députés républicains élus la même année à Marseille dont il avait activement soutenu les candidatures.
Cofondateur du journal l’Égalité dont le premier numéro parut le 1er mai 1870 à Marseille, il y collabora régulièrement dès sa création avec un article appelant résolument à voter « Non » au plébiscite du 8 mai imposé par l’empereur Napoléon III. Parmi ses nombreuses contributions ultérieures à ce journal figure aussi un poème, en décembre 1870. Intitulé « Le Bandit » (pour désigner Napoléon III), ce nouveau poème est également dédié au citoyen Esquiros auquel Crémieux apporta aussi tout son soutien durant la courte période où Alphonse Esquiros fut administrateur supérieur des Bouches-du-Rhône après la proclamation de la IIIe République le 4 septembre 1870, du 7 septembre jusqu’à sa démission deux mois plus tard.
Les vers empreints de colère de Gaston Crémieux dans « Le Bandit » évoquent la plupart des événements qui frappèrent la France et les républicains tout au long de ce « Sombre soixante-dix ! Épouvantable année ! » depuis l’assassinat du journaliste Victor Noir le 9 janvier par Pierre Bonaparte qui sera acquitté, jusqu’à l’ultime défaite de Sedan du 2 septembre, il n’oublie pas non plus le plébiscite tronqué du mois de mai avant lequel un soi-disant complot permit à Pietri, le préfet de Paris, de faire la chasse au « spectre rouge », à savoir les membres de l’Association internationale des travailleurs dont la traque se poursuivit aussi à Marseille.
Si je n’avais retenu ici le poème « Les Voix du Peuple » pour sa générosité, c’est « Le Bandit » que j’aurai choisi pour sa indignation.
Gaston Crémieux écrivit aussi des poèmes en prison, le chapitre Rimes de prison de ses Œuvres posthumes en contiendra quatre [12]. Le plus ancien, « Le Fort Saint-Nicolas » y est daté du 16 août 1870 ; il remonte à sa première incarcération consécutive à l’occupation de l’Hôtel de Ville de Marseille le 8 août précédent, incarcération qui dura jusqu’à la proclamation de la IIIe République le 4 septembre 1870 qui fut suivie par la libération immédiate de tous les prisonniers politiques avec lesquels il avait occupé l’Hôtel de Ville. Les trois autres poèmes inclus dans ses Rimes de prison datent de sa deuxième incarcération, après la Commune : « À ma Noémi » (son épouse) étant daté du 19 juillet 1871, « À Clovis Hugues » (son ami poète incarcéré quelques temps avec lui) du 17 octobre 1871 » et « À Théodore de Banville (un poète qu’il admirait) du 19 octobre 1871.
Mais ses Œuvres posthumes contiennent surtout une longue tragédie en vers « Le Neuf Thermidor ou la Mort de Robespierre » qu’il n’eut pas le temps d’achever en 1871 en prison et qui fut complétée par son ami Clovis Hugues ; avec ses 178 pages cette œuvre rimée occupe la majeure partie des 276 pages des Œuvres posthumes de Gaston Crémieux [13].
L’ensemble des œuvres poétiques de Gaston Crémieux connues forment ainsi un ensemble non négligeable que l’on peut estimer égal en volume à l’ensemble de ses publications journalistiques en prose, souvent animées elles aussi d’un souffle lyrique. Alors que son premier poème connu, « Mes étrennes à L » date de 1856, lorsqu’il avait vingt ans, les « Voix du peuple » de 1868 est une œuvre de maturité. Il était alors âgé de trente-deux ans, avocat et franc-maçon confirmé depuis plus de dix ans et avait aussi déjà mis ses compétences au service d’associations ouvrières marseillaises en rédigeant pour elles un mémoire présenté au préfet en 1867 [14].
Il parle peut-être de lui au début des « Voix du peuple », lorsqu’il écrit : « Enfant du peuple, issu d’une obscure famille » mais les voix qu’il veut faire entendre dans tout le reste de son poème sont celles du peuple devenu « souverain » par son nombre depuis le suffrage universel masculin de 1848. Le mot « peuple » apparaît au moins neuf fois dans ce poème, sans compter ses équivalents, plébéien ou prolétaire, généralement employés pour dénoncer le tort qui leur est fait mais également pour rappeler leurs luttes révolutionnaires passées et les appeler à la rébellion.
Gaston Crémieux lui-même était trop jeune lors des révolutions de la première moitié du XIXe siècle. Venu au monde six ans après l’instauration de la Monarchie de Juillet qui suivit la révolution de 1830 dont il évoque discrètement les Trois glorieuses (les journées révolutionnaires des 27, 28 et 29 juillet 1830 à Paris) en écrivant dans « Les Voix du peuple » : « Nous aurions recueilli pendant les trois journées / du pain pour nos enfants et des balles pour nous. »
Il n’était encore qu’un enfant lors de la Révolution de 1848 et un adolescent lors du coup d’état de 1851 de Louis Napoléon Bonaparte qui instaura le Second Empire sous lequel Gaston Crémieux vécut la majeure partie de sa courte vie et forgea ses convictions républicaines. Ces soulèvements durement réprimés furent les références de sa pensée politique dont la matrice resta la Révolution de 1789 et plus particulièrement Robespierre, victime de son inflexibilité révolutionnaire.
En 2011, lorsque l’historien Jean-Louis Robert, président de l’association des Amies et Amis de la Commune de Paris 1871, résuma la forte communauté de valeurs qui en 1871 unissait les Communards de Paris et ceux de Marseille autour de l’idée de République, il cita un vers de Gaston Crémieux : « Peuple lève-toi, la liberté rayonne au bout des barricades » [15], vers qui figurait justement dans la première publication des « Voix du peuple » dans le journal Le Peuple, mais disparut avec les cinq strophes supprimées de la publication ultérieure de ce poème dans les Œuvres posthumes de Gaston Crémieux.
Les voix du peuple
Enfant du peuple, issu d’une obscure famille,
Ne devant qu’au travail et des jours et des nuits
Le peu que je dois être et tout ce que je suis,
J’aime l’ombre et je hais la vanité qui brille.
Et dans cette ombre austère où courent s’abriter
La liberté, les mœurs, la vertu plébéienne,
En attendant que l’aube ou le grand jour revienne,
J’ouvre un livre où l’histoire enseigne à méditer.
Or, dans ce que je lis, comme en mon existence
Je retrouve mon âme et la vois s’élancer,
Combattre et tour à tour s’élever, s’abaisser...
Âme de plébéien qui gémit et qui pense.
Elle porte des fers qu’elle rompra demain.
Et toujours misérable et toujours indomptée
Mord le joug qui l’opprime, esclave révoltée
De ces mille tyrans qui se donnent la main.
Partout où l’âme humaine est en spectacle et souffre,
Énorme écrasement des petits par les grands ;
De Nemrod le chasseur aux derniers conquérants ;
Partout où de la mort le mal nourrit le gouffre.
Je reconnais ma plainte et ma rébellion.
Le cri de Spartacus, de Christ et de Socrate,
Comme un écho vivant dans ma poitrine éclate,
Et je sens sourdre en moi la Révolution.
Partout du sang, des lois cruelles, des entraves,
Une lutte sans fin, un incessant effort ;
L’humanité veut vivre et repousse la mort ;
Et partout les tyrans écrasent les esclaves.
Mais on voit s’affermir leur domination
Sur tant de pauvreté de principe et d’idée,
Qu’il faut d’aveuglement être bien possédée
Pour en subir le joug, quand on est nation.
Lequel est le plus fort, le plus grand, le plus digne,
Ou du peuple ou du chef qui sur lui veut régner.
Qui des deux doit servir et qui doit ordonner.
La raison a parlé ! que l’orgueil se résigne.
Le peuple est souverain. S’il lui plaît d’investir
D’un titre ou d’un mandat que son pouvoir partage
Quelques grands citoyens élus par son suffrage,
Ce que son pouvoir crée, il peut l’anéantir.
Le droit de travailler pour soi, de vivre libre,
Égaux devant la loi nous appartient à tous.
Nous travaillons pour ceux qui gouvernent pour nous
Et la justice en vain cherche son équilibre.
Ah ! si nos gouvernants nous avaient enseigné
Que le pauvre a pour lot l’éternelle misère
Et qu’humble il doit ramper ainsi qu’un ver de terre.
Le pauvre, mal instruit, s’y serait résigné [16].
Mais ils nous ont donné l’universel suffrage.
Depuis quatre-vingts ans, sur le marbre et l’airain,
Ils ont gravé le nom du peuple souverain,
Fondé le droit nouveau, renversé le vieil âge.
Des paroles de Christ ils se sont souvenus ;
Fraternité. Grand mot. À la raison humaine
Ils ont fait un appel et délié sa chaîne.
Ils ont dit aux penseurs : Soyez les bienvenus.
Ils ont dit qu’ils voulaient émanciper, instruire,
Moraliser. Chacun, citoyen et soldat,
Serait mis au niveau de ce double mandat.
Le servage du corps, ils devaient le détruire.
Et le peuple gémit sous les mêmes fardeaux
S’il vit, angoisses, faim, sueur, deuil, infortune !
S’il meurt, il est couché dans la fosse commune :
Sa souveraineté finit avec ses maux !
Il vient un jour, où las d’espérer et d’attendre
La liberté qui marche à pas lents dans la nuit,
Loin des chemins sacrés le plébéien s’enfuit.
Comme si dans la tombe il se sentait descendre,
Il s’arrête, il se couche, il déplore son sort,
Et maudit l’espérance en appelant la mort.
Autour de lui tout est silence et solitude.
D’un implacable azur le ciel paraît peser
Sur la terre et vouloir de son poids l’écraser.
La torpeur se répand avec la languitude
Dans l’atmosphère lourde où tout semble implorer
Le soleil dont le feu brûle au lieu d’éclairer.
La plante se dessèche et penche sur sa tige,
Le fruit tombe, la fleur s’effeuille et se flétrit.
L’oiseau morne se tait, la source se tarit.
La nature a perdu sa grâce et son prestige,
Tout agonise et meurt dans un calme effrayant.
Soudain la foudre brille et gronde à l’orient.
Emblème de la Force, ô peuple, ô majesté,
Que je souffre à te voir te vautrer dans la boue.
Toi qu’on flatte à l’égal des rois et qu’on bafoue
Quand sur ta large épaule au faîte on est monté !
De tes puissantes voix qu’on capte le suffrage !
De tes robustes bras qu’on arme la fureur !
Qu’on te lance à l’assaut des abus du vieil âge,
Pour exploiter la force en semant la terreur !
Peuple, bouc émissaire éternel de l’histoire,
Chargeant ton cou des fers que l’on t’a fait briser,
Vainqueur, de ton triomphe on te vole la gloire ;
Vaincu, dans ta défaite on te laisse écraser.
Ils t’ont dit que la force était la loi suprême
Et que le plus grand nombre a le droit d’ordonner.
Sur ton auguste front mets donc le diadème ;
Si le plus fort est roi, c’est à toi de régner.
Lève-toi ; de la force indomptable victime,
Montre comment l’agneau se transforme en lion.
Que ta dolente voix qui gémit dans l’abîme
Jette le cri tonnant de la rébellion.
En avant ! En avant !
Ah ! je veux bien combattre,
Dis-tu, comme je sais vaincre, je sais mourir,
Mais, enfant de la terre, une mère marâtre
Mort me garde et vivant ne veut pas me nourrir.
Ces tiges qu’en un jour j’avais déracinées
En mâchant la cartouche amère au lieu de pain,
Je les vois refleurir en têtes couronnées
Je peux d’un souffle encor les broyer, mais j’ai faim !
La liberté rayonne en haut des barricades
Mais la famille attend notre gain journalier ;
Le fusil prolétaire éteint les canonnades,
Mais la misère éteint la lampe et le foyer.
Si la victoire au moins domptait cette souffrance.
Si la patrie encore payait sa fierté
Et si ceux qu’on nomma les sauveurs de la France
De se sauver eux-mêmes avaient la volonté.
Nous aurions recueilli pendant les trois journées,
Du pain pour nos enfants et des balles pour nous ;
Afin qu’on ne vît pas, dans la rue, obstinées
Les femmes des héros mendier à genoux [17].
Peuple, il ne suffit plus de la Force et du Nombre ;
Pour vaincre, il faut l’Idée. Ah ! connais mieux ton sort.
Tu nourris en toi-même un ennemi plus fort
Qui te frappe sans cesse et marche dans ton ombre.
Il te laisse ignorer ce que tu dois savoir ;
Pour toutes les horreurs, il t’ouvre des écoles ;
Il invoque ton nom en des discours frivoles
Qui te vantent ton droit et jamais ton devoir.
Ton plus grand ennemi, c’est ta propre ignorance.
Instruis-toi, travailleur, chasse-la de ton sein ;
Sinon la liberté perdra toute espérance,
Voyant l’atelier vide et le cabaret plein [18].
Introduction aux Impressions d’un condamné à mort
Un manuscrit intitulé « Impressions d’un condamné à mort » faisait partie des objets retrouvés dans la cellule de Gaston
Les archives familiales de Gaston
L’année de la première parution des Œuvres posthumes (qui après 1879 connut des rééditions successives et identiques au moins jusqu’en 1887) coïncide avec la promulgation de la loi du 3 mars 1879 sur l’amnistie partielle des Communards qui permit le commencement du retour des déportés de Nouvelle-Calédonie, avant la loi du 11 juillet 1880 sur l’amnistie totale des individus condamnés pour avoir pris part aux événements insurrectionnels de 1870-1871 et aux événements insurrectionnels postérieurs. La première de ces lois permit aussi l’allégement des interdits pesant sur les publications relatives à la Commune et aux Communards, permettant notamment la publication des Œuvres posthumes de Gaston
Le texte des « Impressions d’un condamné à mort » ouvre ces Œuvres posthumes, après la lettre du poète Victor Hugo (qui avait défendu les lois d’amnistie des communards) adressée à la veuve de Gaston
C’est un texte assez court : il n’occupe que 23 des 476 pages des Œuvres posthumes (pages 21 à 44) et se présente sous la forme d’un journal rédigé en prison du 28 juin au 15 novembre 1871 ; la première journée y occupant presque le tiers de ces pages (pages 21 à 29). Le texte débute dans la matinée du 28 juin avec la dernière courte audience au tribunal où les membres du conseil de guerre se retirent pour délibérer tandis que les prévenus sont transférés à la prison du Fort Saint-Nicolas. Ce n’est que dans la soirée, dans cette prison, qu’ils eurent connaissance des sentences prononcées à leur encontre par le conseil de guerre. Le narrateur n’évoque alors que sa propre condamnation avec beaucoup de dignité : «
Au fil du texte,
Le 28 juin 1871, dans l’après-midi, après délibérations, le 1er conseil de guerre de la 9e région militaire de Marseille prononça à l’unanimité :
– trois condamnations à la peine de mort à l’encontre de Gaston
– cinq condamnations à la peine de déportation dans une enceinte fortifiée : Claude Breton, 46 ans, pharmacien, Henri Chachuat, 26 ans, menuisier, Jean-Baptiste Duclos, 36 ans, menuisier, Joseph Martin, 38 ans, tailleur de pierre, et Jean-Marie Nastorg, 31 ans, agent de commerce ;
– une condamnation à la peine de dix ans de travaux forcés : Philippe Novi, 38 ans, tailleur d’habits, ancien gardien de la paix ;
- une condamnation à la peine de cinq ans de travaux forcés : Alexandre Bauche, 41 ans, tailleur d’habits ;
– une condamnation à la peine de dix ans de détention : Alphonse Éberard, 39 ans, instituteur ;
– six acquittements : Émile
Dans l’ensemble des « Impressions d’un condamné à mort », on cherchera en vain un rappel des événements auxquels
Dans « Impressions d’un condamné à mort »
Adolphe
A côté de faits relatifs à la prison, à son procès, ou aux démarches de son épouse, Gaston
Lorsque le 15 septembre 1871 la Cour de cassation rejeta leur pourvoi, il ne restait plus à Gaston
Avant de mourir,
Ses toutes dernières lignes sont celles d’un homme qui se prépare à mourir, disant à lui-même « je dois écrire ce que j’ai fait, ce que j’ai vu, ce que j’ai su ». Il n’eut pas le temps de le faire, « Impressions d’un condamné à mort » est le seul texte autobiographique connu de Gaston
Impressions d’un condamné à mort
« L’homme est un apprenti ; la douleur est son maître,
Et nul ne se connaît avant d’avoir souffert.
A. de Musset (Les Nuits)
Les vaincus n’ont pas d’histoire.
Marc-Duffraisse » [27]
28 juin 1871.
Ce matin, nous n’avons fait à l’audience qu’une courte apparition. À peine étions-nous assis, le président nous a répété automatiquement la question qu’il nous avait adressée la veille ; il nous a demandé si nous n’avions rien à ajouter à notre défense. Il s’agissait pour lui de couvrir une nullité de forme. Nous nous sommes bien gardés de répondre, le laissant libre d’interpréter notre silence à sa guise. La clôture des débats a donc été prononcée en réalité pour la seconde fois.
Alors de Pleuc, avocat de Ducoin, s’est levé et il a déposé, au nom de M. Rouvière, défenseur de
La maladresse était commise, avant que nous eussions pu l’empêcher.
Le conseil est entré dans la salle des délibérations, et nous avons été reconduits dans notre prison.
Bientôt après, on nous avertit que nous allons être transférés au fort Saint-Nicolas ; nous faisons nos préparatifs en toute hâte ;
Nous voici rangés sur deux lignes dans le vestibule du palais de justice qui donne sur la rue Fortia. Les gendarmes nous mettent les menottes ; on attache ma main droite à la gauche d’Étienne ; mais la chaîne ne nous serre pas.
Nous prenons place avec Pélissier et Ducoin, Duclos, Novi, Nastorg et
Il est neuf heures ; la matinée est splendide. Dans la rue Fortia et dans la rue Grignan, au seuil des portes et des magasins, aux fenêtres des maisons, nous apercevons des visages attristés où la sympathie a plus de place que la curiosité banale. Quelques femmes pleurent sur notre passage ; ceux qui nous connaissent nous désignent et semblent prononcer notre nom. Des enfants courent insouciants, en tête de notre cortège. Je pense à mes trois êtres chéris, à ma jeune femme, et des larmes coulent de mes yeux. Un prêtre, dit-on, nous suit. A notre droite marche un jeune lieutenant, blond, svelte, plus ennuyé qu’impressionné ; son attitude est digne.
Nous approchons du boulevard de la Corderie. Je lis nonchalamment une enseigne inachevée, aux lettres noires, sur une muraille blanche : Fonderie de la Corderie. Puisse-t-elle prospérer ! A ce moment, la brise marine dilate et rafraîchit nos poumons.
Voilà six jours que nous n’avons respiré l’air libre, et cette vague senteur caresse notre imagination et nos sens alourdis. Au large, le château d’If où tant d’autres gémissent. Plus loin, l’espace immense, l’horizon bleu.
Encore quelques instants, et cette vision de la liberté aura disparu, et je ne verrai plus que la voûte humide et sombre de notre casemate.
Duclos remarque que le mur d’enceinte du fort n’est élevé que de quatre mètres tout au plus au-dessus du roc taillé en plate-forme près de la caserne Saint-Victor, et que cette plate-forme n’est pas gardée.
Les voitures gravissent paisiblement le chemin escarpé qui ceinture le glacis du donjon du côté d’Endoume et des Catalans. Le pont-levis est abaissé, et pour la troisième fois le fort Saint-Nicolas nous ressaisit.
Étienne rajuste en toute hâte la chaîne des menottes que chemin faisant, nous avions sans plus de façon mise dans nos poches, sous le regard bienveillant du brave brigadier qui, pendant tout le cours du procès, m’a constamment taillé mon crayon avec une patience infatigable. Cet homme nous plaint ; il ne peut s’habituer à nous considérer comme des malfaiteurs ; il comprend que ma main fait trop d’honneur à ses menottes. Que ne nous épargnerait-il pas, s’il était le maître !
Brigadier, vous avez raison.
On nous conduit enfin dans la demi-lune où l’on descend par un étroit escalier qui relie le chemin de ronde au bastion qui domine la caserne Saint- Victor ; on ferme la porte sur nous.
On éprouve un saisissement douloureux à entrer dans un nouveau cachot, comme à quitter celui où l’on a vécu, ne fut-ce que quelques heures.
La merveilleuse élasticité de la nature humaine réagit vivement contre cette première impression.
Bientôt on se secoue, on s’oriente, on se case à sa guise, au gré de ses habitudes et de ses sympathies, les uns cherchant l’ombre, d’autres la lumière ; puis, l’installation finie, on se remet au rêve, au sommeil, au travail interrompus ; on s’arrange le plus commodément possible pour vivre, en attendant ce qu’on espère ; comme un mendiant turc endormi qu’un passant a heurté du pied et qui, après avoir maudit le chien de chrétien et grommelé entre ses dents, reprend son somme.
Jetez un homme au fond d’un gouffre, ôtez-lui l’espoir d’en sortir ; encore tout meurtri de sa chute, il cherchera ses aises, un lit pour le repos de son corps et de ses pensées. Encore, pensera-t-il peu. En prison, la grande affaire est de savoir où et comment on dormira. C’est là surtout que le sommeil apporte l’oubli des maux. Neuf fois sur dix, on rêve qu’on est libre. Aussi chacun de nous se met à l’œuvre et en quelques minutes la prison se transforme ; chacun a déjà marqué sa place en l’occupant.
Notre cachot, appelé demi-lune, taillé dans le roc, ressemble, comme son nom l’indique, à un tunnel, haut de quatre mètres, de treize mètres de long sur six mètres de large. Il est faiblement éclairé par une fenêtre grillée, donnant sur l’escalier, et par deux lucarnes rondes percées dans la voûte donnant sur la terrasse, où elles sont recouvertes d’un chapiteau en bois noir : comme si l’on voulait que la lumière ne nous arrivât pas directement du ciel.
Nous sommes bien restés un quart d’heure avant d’y voir goutte. A droite, le long de la muraille, court un énorme lit de camp dont l’entablement est bâti dans le roc.
Les seize matelas [28], serrés les uns contre les autres, y sont à l’étroit. Mais on sait que le verdict en délibération éclaircira les rangs.
Hermet et Genetiaux seront certainement acquittés. Le commissaire du gouvernement a abandonné l’accusation à leur égard.
On croit à l’acquittement de Ducoin, de Sorbier, de Breton, sans aucun doute, et peut-être de Matheron.
En attendant, les conjectures vont leur train, et comme la casemate est vaste, on va et vient par groupes animés. Matheron, qui a dessiné mon portrait, réclame quelques vers pour le sien. On me prête un crayon et j’improvise sur le mur un acrostiche plusieurs fois interrompu : je me hâte de le terminer, sentant bien que ma liberté d’esprit serait de peu de durée, tout autant que la détention du dessinateur. Il faut en finir ! comme disent nos adversaires politiques. Les deux derniers vers arriveront péniblement. Enfin, grâce à la collaboration de Breton, l’acrostiche est terminé, et Matheron le recopie avec une satisfaction visible.
Le voici :
Matheron, commandant de la garde civique,
A la garde civique a dû tous ses malheurs ;
Tout ce que sa nature avait de pacifique,
Humeur fraîche, cœur d’or, crayon philosophique,
Est voilé par ce spectre aux sinistres couleurs.
Rivé par l’injustice à cette ombre baroque,
On voit que notre ami, pour finir ses douleurs,
N’avait que son crayon, et d’un trait il la croque.
Pendant que nous rimons, le conseil de guerre délibère en déjeunant et distribue nos condamnations sans perdre une bouchée.
Midi sonne, - notre dîner n’arrive pas, - nous avons faim. - Nos familles sont-elles averties de notre transfèrement ?
Singulière journée toute pleine de surprises et d’inquiétudes, de tristesse et de joie immodérée ! — On passe sans transition de l’abattement à une gaieté folle. J’observe un instant mes compagnons. Pélissier dort ; il a élevé le sommeil à la hauteur d’une institution et prétend avoir trouvé le moyen de dormir à volonté. Étienne fume à côté de Breton, qui fume aussi de l’air d’un homme certain de coucher dans son lit. Il trouve tout au plus la délibération du conseil un peu longue ; mais il consent à prendre patience.
Ducoin, Éberard se promènent à grands pas. Ils sont anxieux, mais ils espèrent.
Bouchet et Matheron sont d’une gaieté folle. Ce qui est très rare chez Bouchet est très commun chez Matheron. Matheron rit par caractère, par tempérament ; nature franche, âme d’artiste ; sa joie déride les fronts les plus soucieux. Il ignore ce qui sera décidé de lui sans pouvoir se résoudre à s’en inquiéter. Le rire de Bouchet est forcé ; il ne sait pas rire, sa joie éclate triomphante, mais il essaye de la contenir.
Duclos, Chachuat, Novi discutent très haut sans pouvoir ni vouloir se comprendre : ce qui les amène à se fâcher souvent.
Sorbier dévore ou plutôt dépouille les journaux et se livre par moments à des commentaires enthousiastes. Il croit à son acquittement ; mais comme il a déjà recueilli une condamnation pour délit de presse à deux ans de prison, cet espoir serait-il une certitude qu’il ne changerait en rien son humeur.
Enfin, on nous annonce l’heure de la promenade et du dîner. On nous conduit sur le chemin de ronde et nous mangeons par groupes, sous un soleil caniculaire, entre deux haies de chasseurs, la baïonnette au fusil. Nous nous plaignons de cette récréation transformée en torture ; mais nos surveillants n’y peuvent rien.
Quand nous pouvons à la dérobée nous tenir debout sur les assises du glacis, nous jetons un regard sur la colline et l’église de Notre-Dame de la Garde, sur la colline Bonaparte, sur un coin de ce Marseille que nous aimons tant, où nous avons vécu au milieu des nôtres, heureux, considérés, actifs, dévoués à notre cause. — Hélas ! dans quel abîme allons-nous être précipités !
Est-ce par notre faute ?
Montaigne dit : Que sais-je ?
Et je me souviens d’un vieux vers latin qu’un poète du XIIIe siècle ne croyait pas avoir écrit pour nous : Felix quem facient aliena pericula cautum. [Heureux celui que les épreuves d’autrui ont rendu sage].
Mais est-il digne de mettre à profit les périls des autres pour devenir habile ?
Laurier dit : Oui ; Je dis : Non !
Ainsi ont passé, ainsi ont agi les Delpech, les Rouvier, et leur maître à tous : Laurier le pleutre.
Piètres personnages dont le temps est venu !
Voilà déjà plusieurs heures que nous rôdons dans notre casemate ; on a chanté, on a soupé, on s’est égayé à froid ; on a discuté sur les chances du jugement.
Depuis la veille, je me suis imaginé que le conseil de guerre pencherait pour l’indulgence et que je serai condamné à... cinq ans de détention, et cela m’effraye !
Tout à coup, la porte s’ouvre, un bruit de pas remplit l’escalier, on apporte une table, deux chaises, une bougie dans un chandelier plaqué en argent : le tout pour le prononcé de notre sentence.
Cette faible lumière dans notre prison sombre produit un effet lugubre.
Le commissaire du gouvernement entre et reste près de la porte. M. Peloux, le greffier, se place devant la table ; nous nous rangeons tout autour, en deux cercles.
Je me trouve placé en face du greffier, en pleine lumière. D’une voix rendue assurée, il lit :
«
Un trait rapide me traverse le cœur, mais j’attache, sans parler, ni trembler, un regard dédaigneux sur le commissaire du gouvernement, qui tient ses yeux baissés ; je n’éprouve ni douleur, ni crainte. Il me semble qu’on vient de me lancer une insulte ; si j’ai fait un geste, j’ai dû hausser les épaules ; je plains mes juges.
Pélissier a continué de rouler sa cigarette ; Étienne, la main appuyée contre le mur, n’a pas bougé.
Breton, qui attendait sa mise en liberté, s’entend condamner à la déportation ; il paraît avoir reçu un grand coup.
Quelques-uns font éclater leurs plaintes.
……………………………………….. [29]
Sorbier, hors de lui, mais acquitté, lâche cette parole furieuse : « Comment ! ils ont condamné Breton ? Nous sommes tous coupables, excepté lui ! Qu’on nous fusille tous, mais qu’on acquitte Breton ! »
Je m’assieds et je prie mes amis de se calmer. Il est convenu avec M. Peloux que l’on viendra le lendemain recevoir notre pourvoi en révision.
Bouchet, Ducoin, Hermet, Genétiaux, Matheron, acquittés, nous embrassent à la hâte ; leurs familles les attendent, ils retournent dans la vie, ils seront heureux.
Ducoin, Matheron, Hermet pleurent en nous quittant.
La porte se referme, le verrou est tiré.
Un grand silence règne dans la casemate ; chacun se retire à l’écart ; je me couche ; je pense à ma femme, à mes enfants, à tous ceux que j’aime et qui, comme moi, ont la mort dans l’âme. Je pleure silencieusement.
Nuit douloureuse entre toutes, nuit de fièvre, d’angoisses mortelles !
Ô mon Dieu, épargne à mes plus cruels ennemis de pareilles tortures !
Pendant cette nuit-là, toute mon existence a passé comme un rêve dans mon esprit tourmenté. Et à chaque instant, comme s’il se déroulait en moi la chaîne de ma vie, une figure angélique apparaissait et disparaissait tour à tour. Des paroles d’amour, de consolation, d’espérance retentissaient à mon oreille :
— Ne crains rien, je suis là, je veille. Ne suis-je pas ton ange gardien ?
J’ai mis la main sur mon cœur tout rempli d’elle, j’ai répété mille fois son nom, et bercé par cette douce image, vers le matin j’ai dormi.
29 juin.
Nous signons notre pourvoi en révision, nous déjeunons paisiblement en attendant l’heure des visites. En ce moment le fort Saint-Nicolas regorge de détenus politiques ; il n’y a qu’un parloir et deux jours de visite par semaine ; l’entretien de famille sera bien raccourci ; il durera quelques minutes à peine. Dure nécessité ! le temps est long, déjà quelques-uns d’entre nous ont été appelés ; enfin, mon tour arrive ; je hâte le pas, entre les quatre chasseurs qui m’accompagnent. J’entre enfin dans le parloir.
C’est ma Noémi que j’aperçois la première ! Elle se lève ; nous nous regardons un instant avant de nous rapprocher ; nous nous sommes compris. — Du courage ! Ne livrons pas notre douleur en spectacle ! Un ardent baiser a tout dit.
Mon père, maman, mes beaux-frères me font part des marques de sympathie dont je suis l’objet et que ma condamnation a éveillées dans toutes les classes de la population marseillaise. On ne croit pas à l’exécution ; on sait notre énergie, on partage notre douleur.
Noémi va partir pour Paris ; elle a déjà reçu un télégramme d’Adolphe
………………………………………..
Dimanche, 2 juillet.
Aujourd’hui encore, nous recevons des visites. Les échos de la ville émue arrivent jusqu’à nous. On s’indigne des condamnations prononcées ; on ne croit pas à l’exécution. Pour nous, nous sommes convaincus que ceux qui ont eu le courage sans épithète de nous condamner de cette sorte, nous feront exécuter, s’ils le peuvent ; mais le pourront-ils ? Condamnés et juges sont pesés dans la même balance ; de quel côté penchera-t-elle ?
Noémi est arrivée à Paris, M. Adolphe
Mais il me garde rancune, et, en attendant qu’il connaisse ma conduite, il ne veut pas me pardonner, dit-il. Nous verrons bien !
J’ai écrit à Me Albert Aicard [30] une lettre où j’ai laissé déborder toutes mes douloureuses impressions et ma gratitude envers lui.
Au fond, je m’en veux de rendre malheureux un de mes confrères qui vivait si heureux, si tranquille, en père de famille, à l’abri des soucis et des préoccupations politiques.
Nous l’avons entraîné dans cette sphère ardente où nous vivons depuis deux ans.
Puisse-t-il en sortir le plus vite possible et retrouver le calme et le repos d’esprit que nous lui avons enlevés !
Mauvaise nouvelle ! On a fait la nuit dernière soixante arrestations à la Belle de Mai. Le fort Saint-Nicolas regorge de détenus, les surveillants sont sur les dents. Ils se plaignent beaucoup plus haut que les prisonniers.
Voyons, monsieur Espivent [31], un bon mouvement. Par pitié pour les geôliers, cessez d’emprisonner les républicains !
Grande nouvelle, grande joie sur toute la surface de la France ! Les légitimistes sont battus : sur 114, 93 républicains sont élus ; l’horizon s’éclaircit.
Nous soupons en famille, tous ensemble ; nous chantons, nous lisons tout haut le discours de Gambetta aux paysans. Voilà enfin une soirée joyeuse, après tant de tristes journées.
Sorbier nous quitte, on le transfère à la prison civile de Saint-Pierre. J’ai écrit à Noémi de faire pour moi la même demande. Réussirons-nous ? Nous quitterions cette casemate humide où nous sommes condamnés à perdre la vue et à gagner des rhumatismes, comme le pauvre Gustave Naquet [32]. Reverrons-nous Sorbier ? Nous nous embrassons et nous pleurons ; séparation cruelle pour des hommes habitués à vivre ensemble, à se consoler mutuellement ! La communauté devient si étroite, qu’un départ semble un déchirement d’entrailles.
Noémi à Paris fait des merveilles. Elle émeut profondément tous ceux auprès de qui elle intercède. — Que de courage il lui faut pour lutter contre tant de préventions et de passions déchaînées contre nous, considérés comme des hommes sanguinaires, des scélérats dignes de tous les supplices ! Tout d’abord mal reçue, elle parvient à force d’éloquence, à faire passer chez d’autres la conviction qui l’anime. M.
Le vendredi 7 juillet, à trois heures du matin, juste trois mois, heure par heure, après mon arrestation , comme nous dormions profondément dans notre demi-lune, qui n’était pas précisément une demi-lune de miel, on vint nous avertir, sans préambule, que les condamnés allaient être conduits à la prison de Saint-Pierre.
Voilà toute la casemate en émoi.
Nous avions d’ailleurs un quart d’heure pour nous lever, nous habiller et nous préparer. Je fus saisi d’un accès de bile qui dura au moins dix-huit minutes ; j’étais dans la voiture cellulaire que je continuais à expectorer.
Que voilà bien le régime militaire ! Ses faveurs, quand il nous en gratifie par hasard, vous tombent sur la tête comme des bombes. Le militaire ne vous crie jamais gare. Il vous envoie de même façon ses aménités et sa mitraille.
On aurait pu nous avertir dès la veille que nous serions transportés dans une prison moins humide ; nous nous serions préparés à l’aise et nous aurions dormi d’un sommeil aisé.
Pas du tout, on nous bombarde rudement d’un adoucissement de peine comme si l’on venait ex abrupto nous passer par les armes.
En trois temps et un mouvement !
Attention ! Joue ! Feu ! On vous pardonne.
Tous ces gens-là ont conservé, je ne sais comment, un cœur fossile qui palpite de temps en temps sous une couche alluvionnaire de discipline, de commandement et de brusquerie. En résumé, ils sont plus naïfs que méchants.
Il y eut, à cette nouvelle, parmi nos camarades et nous, un mouvement de surprise douloureuse.
Nous étions comme ces corps dont on arrache les membres un à un.
Tous se levèrent sur leur séant et nous regardions faire nos apprêts de voyage, comme si nous partions pour les antipodes et qu’ils ne dussent plus nous revoir.
A part les différences d’opinion réduites à de pures nuances, et celles de tempérament et d’éducation, la plus étroite fraternité n’avait pas cessé de dominer parmi nous, et la nombreuse compagnie nous préservait de tout ennui ; mais peu à peu les rangs s’éclaircissaient, et ceux qui demeuraient dans cette triste cave sentaient pénétrer en eux le froid de l’obscurité et de la solitude.
D’abord l’acquittement avait ouvert la porte à Bouchet, à Matheron, à Duclos ; les deux derniers m’étaient très sympathiques ; Hermet, qui m’était très dévoué, Genétiaux, étaient partis avec eux. Ce fut bien pire au départ de Sorbier, que nous ne pensions plus revoir, et pourtant nous le retrouvons à Saint-Pierre. Plusieurs d’entre nous pleuraient en l’embrassant ; il était excellent camarade, gai causeur, esprit subtil, enclin à l’enthousiasme, surtout homme bien élevé et de bonne compagnie ; ce qui ne gâte rien, surtout en prison, où les natures violentes, surexcitées par le chagrin, tournent à la fureur ou à l’hypocondrie.
Enfin, nous partions à notre tour, et nous sentions bien que la douleur que nous éprouvions était partagée par nos camarades. Ainsi notre chambrée était coupée en deux : une partie s’en allait à Saint-Pierre attendre ! Quoi ? On ne le sait que trop et pourtant on en doutera jusqu’à la dernière heure. L’autre retournera peut-être au château d’If, puisqu’il est dit qu’une prison, si remplie qu’elle soit, doit toujours finir par se vider. — Nous reverrons-nous jamais et surtout libres ?
On se quitte, attristés, comme si l’on ne devait jamais plus se revoir.
Breton paraît consterné et fait semblant de se rendormir, il a peut-être peur de sa faiblesse, — esprit charmant qui vivait de causerie ! — Lui reste-t-il quelqu’un avec qui converser et philosopher pendant les longues heures de la nuit ? Il s’était établi entre nous une fraternité de poète à poète qui nous rendait moins pénible la monotonie de la prison. Je lui prenais le bras, lui fumant et rêvant, et je lui récitais des vers dont il savourait avec délice les moindres beautés et dont il critiquait galamment les passages médiocres.
Il se tourne, m’embrasse, et retombe sur son lit comme une masse inerte.
Nous avons su plus tard que Breton craignait dès lors d’être reconduit au château d’If et qu’il ressentait une profonde horreur pour cette abominable prison politique où les prisonniers étaient rongés par la vermine, couchés sur une paille ou plutôt sur du fumier, buvant de l’eau et respirant un air rare par une grille étroite ; on était quatre-vingts prisonniers dans une casemate qui pouvait à peine en contenir quarante.
Pauvre République ! Comme on abuse de ton nom pour martyriser tes enfants les plus dévoués !
Mais eux ne s’y trompent point ! Ils savent que les coups qu’ils reçoivent ne leur viennent pas de ta main.
Console-toi, ils t’aiment toujours dans leurs souffrances.
Cette fois on nous serre fortement les menottes, en nous rapprochant les deux mains l’une de l’autre. Au moindre mouvement, la chaîne de fer mord la chair.
On nous enferme dans la voiture cellulaire ; deux gendarmes et leurs carabines y montent avec nous ; l’un se place sur le siège près de la grille, l’autre près de la portière fermée. Cette voiture, espèce de maringote carrée, peut contenir tout au plus huit personnes.
Chemin faisant, le gendarme avec qui j’échange quelques paroles, m’apprend qu’il a été transporté dans cet étroit espace jusqu’à dix-huit détenus à la fois. Les malheureux sont alors entassés et s’assoient les uns sur les autres, par pile de trois hommes, le tout pour la plus grande gloire de la justice française !
La voiture avance avec une désolante lenteur, escortée par deux compagnies de soldats de ligne, en tout 250 hommes, six gendarmes et des menottes. On voit bien que nous sommes transférés par mesure de sûreté ! Et nous sommes bien en sûreté. Ce luxe de précautions est satisfaisant à une heure où l’on ne rencontre dans les rues de Marseille que des chats amoureux et des rats affairés.
Nous apercevons, par des regards obliques jetés par-dessus l’épaule du gendarme chargé de nous empêcher de voir et de respirer, les arbres du cours Bonaparte [33] plus tard les arbres de la rue de la Darse [34], plus tard enfin ceux du Prado que nous n’apercevons qu’un instant, au moment de nous engager dans le boulevard Bayle[Boulevard Baille aujourd’hui.]]. Nous avons dû passer, sans nous en apercevoir, sur la place de la Préfecture ! Que de souvenirs éveillés en nous !
Enfin, nous suivons le boulevard Sébastopol, où se trouve la place des exécutions [35] : nous voilà bien entre le passé et l’avenir !
Enfin, nous entrons à Saint-Pierre.
Après les formalités d’usage au greffe, on nous dépouille de nos bijoux, de notre argent, des vêtements enfermés dans nos valises ; mais cela se fait avec quelque pudeur ; puis on nous conduit chacun dans notre cellule. — Les cellules des condamnés à mort ! Ils m’envoient à une d’elles, où fut enfermé le fameux brigand Quaranta [36] ! J’ai failli plaider pour lui.
Encore une navrante impression ! La cellule !
Deux verrous, un en bas, l’autre en haut de la porte, une forte serrure au milieu, la ferment avec un grincement sinistre. Me voilà seul au petit jour !
J’examine mon logis ! Voûte et mur blanchis à la chaux avec une bande noire en bas. Un catafalque en pierre : 4 m 50 de haut, 3 mètres de large sur 4 mètres de long.
Au midi, la porte étroite munie d’un vasistas et d’un œil taillé dans le bois, sorte d’argus le plus souvent aveugle, mais qui soudain peut voir !
Le gardien passe dans le corridor, il s’arrête, on est regardé, surveillé.
C’est atroce et stupide !
À l’est, une petite table blanche fixée au mur, et à côté de la table, un petit banc également fixé dans le mur et au parquet.
De cette façon, l’administration est certaine que le mobilier ne s’envolera pas.
En face, un lit de camp fixé de la même manière, avec un vasistas qui communique avec la cellule du gardien, fermé d’ordinaire. En cas de maladie ou d’accident, on peut par là appeler du secours.
Sur le lit de camp étroit de 50 centimètres, taillé en pente, haut de 25 centimètres et de 15 à sa base, long de 2 mètres, une paillasse maigre sur un matelas efflanqué.
Deux draps étroits, une couverture de lit, si bien faits qu’ils vous débordent et au moindre mouvement glissent sur le parquet.
Ô République ! Par amour pour toi, nous tâcherons de nous y faire.
Ah ! Qui me rendra mon lit nuptial, large de six coudées, mon édredon, ma bouillotte d’hiver, mon sommier élastique et ma jeune femme souriante au réveil !
Et puis mes beaux enfants qui venaient le matin gambader entre nous !
Ne pensons plus à la joie du passé dont le souvenir m’ôte tout à coup mon courage.
Au nord, la fenêtre, d’un mètre carré, grillée, pourvue d’une croisée mobile, semblable à une soupape horizontale.
Au demeurant, le tout est propre, sinon luxueux ; mais le lit est habité.
Il faudra se livrer à une Saint-Barthélemy d’insectes anthropophages.
Je ne parle que pour mémoire de la table de nuit creusée dans le mur, de la bouche de chaleur pour l’hiver, placées à côté de la porte.
Telle est ma cellule, claire pourtant, aérée, haute de caveau, où rien ne traîne, où rien ne bouge, si ce n’est moi, qui vais et viens comme une bête fauve dans sa cage, afin de représenter la vie dans le temple de l’immobilité.
Fatigué de tourner dans un aussi étroit espace, pris de vertige, je me couche, et la tristesse, à défaut du sommeil, me gagne invinciblement.
Ô République ! Sois-moi témoin que j’ai lutté tant que j’ai pu !
La cellule pèse sur l’homme comme un manteau de plomb. II y perd à la longue jusqu’à la faculté de penser ; cette voûte arrondie, sans angles, où l’œil se repose mal, cette uniformité, cette nudité des murs alourdissent les sens et les plongent dans une torpeur atrophiante.
Il n’est pas bon que l’homme vive seul.
La cellule est la solitude compliquée d’une lugubre perspective. — Me fera-t-elle la confidence des soupirs, des gémissements, des sanglots qu’elle a entendus ? Et fera-t-elle à d’autres la confidence des miens ?
La serrure crie, les verrous grincent : je me dresse sur mon lit. C’est le directeur ! Possesseur de la tête à poire et du galbe harmonieux de Louis-Philippe, il me déclare, le brave homme ! Qu’il n’est pas républicain. Avait-il besoin de me le dire ? Je le vois, et je le sais bien, parbleu ! Et d’abord il ne serait pas en place.
Il m’annonce avec un accent montpelliérain assez prononcé que le règlement de la prison de Saint-Pierre n’a pas prévu notre cas, qu’il nous accordera pourtant trois heures de promenade, et en général tout ce qu’il ne pourra pas nous refuser. Total : 21 heures de cellule par jour. Je me récrie, je proteste, je fais valoir hautement mes droits et mes titres de condamné politique. — Le règlement est muet, le directeur est sourd.
Pendant notre promenade, nous décidons que nous adresserons au préfet des Bouches-du-Rhône, M. O. Salvetat, une réclamation collective, afin d’obtenir les immunités d’usage accordées aux détenus politiques
Notre requête, bientôt rédigée, est déjà en route.
Nous demandons le droit de recevoir les aliments préparés et apportés par nos familles, de voir nos parents dans le parloir libre et non dans le parloir grillé ;
De rester en promenade dans la cour qui nous est affectée, de six heures du matin à midi, et de deux heures à sept heures ;
De prendre nos repas en commun dans la cellule de l’un de nous ;
De recevoir des journaux politiques et notre correspondance, directement, hors de la voie du greffe d’où nos lettres nous parviennent décachetées et lues ;
Enfin, une fois par semaine au moins, ceux d’entre nous qui sont mariés désirent déjeuner au parloir avec leur femme.
Ces demandes sont accordées et nous commençons à voir se relâcher en notre faveur le régime dont nous avons ressenti la douloureuse atteinte.
Depuis lors, je me hâte de le dire, il semble qu’on s’est étudié à nous rendre l’existence de plus en plus supportable. Nous n’avons pas le droit de nous plaindre. — Au point de vue matériel, nous sommes aussi bien qu’on peut l’être dans une prison.
Nos gardiens sont pour nous des camarades qui connaissent notre loyauté et ne craignent point que nous abusions de la liberté et des commodités que nous avons prises peu à peu.
J’ai souffert, les premiers jours, de recevoir mon père, mes sœurs, et surtout ma mère, au parloir grillé. Ce dernier vestige de l’inquisition devrait bien disparaître.
Voir à quelques centimètres de soi, à travers les mailles d’une cage à poulet, un visage chéri et ne pouvoir l’embrasser, ne pouvoir serrer une main aimée, et être réduit à s’envoyer des baisers de la main et des lèvres, se parler, que dis-je ? Pleurer à distance, quelle servitude et quelle torture dont les juges ne se doutent point, ou du moins qu’ils n’ont pas endurées !
Ma pauvre mère a sur le visage une douleur mortelle. Elle ne gémit pas, elle ne pleure pas, ses larmes semblent figées intérieurement en elle ; derrière les yeux, on devine ce qu’elle souffre ; je souffre, moi, comme je n’ai jamais souffert. Ah ! Comme je voudrais la voir pleurer ! Les pleurs au moins la soulageraient.
Elle semble rêver. Son fils, son Gaston dont elle était si fière, si heureuse naguère, condamné à mort !
Il semble qu’elle est le jouet d’un affreux rêve, qu’à chaque instant elle se réveille et qu’on lui dit qu’elle a rêvé.
Ô ma mère, pourquoi ne peux-tu pas pleurer ?
Je m’enferme dans ma cellule, je me maudis mille fois, sans vouloir m’entendre ; je suis un malheureux de la rendre, elle, si malheureuse, d’empoisonner ses derniers jours, de désoler sa vieillesse, d’être l’enfant de son désespoir, au lieu d’être l’enfant de son orgueil.
Oui, je maudis tout ce que j’aime, je foule aux pieds mes convictions, je blasphème contre la République tant aimée, parce que ma mère souffre trop pour pouvoir pleurer.
Et toi qui fus mon autre mère, ô ma patrie ! pardonne-moi le cri de mes entrailles et rends-moi la force que j’ai perdue !
Ô mon Dieu, faites qu’aujourd’hui je ne sois pas privé de la vue de mes trois êtres les plus chéris avec ma mère et ma femme !
Ce serait trop de douleurs pour un seul jour ; j’y succomberais.
Juillet, août, septembre, octobre, novembre s’écoulent sans que notre situation matérielle se modifie ; à part quelques caprices administratifs de courte durée, notre existence prend un cours régulier et monotone. Ma Noémi est partie pour Paris, sur un télégramme de notre vénéré Adolphe
Le conseil de révision rejette notre pourvoi. Noémi reçoit une nouvelle dépêche pressante le 26 juillet. Elle repart ; son absence dure dix jours ; même retour joyeux, mêmes promesses consolantes venues de haut ; cette fois on s’intéresse à nous, on veut nous sauver.
Enfin, le 15 septembre, la cour de cassation rejette définitivement notre dernier recours : il ne nous reste plus que le pourvoi en grâce. — Noémi repart pour la troisième fois. La commission des grâces renvoie sa réunion de semaine en semaine. Septembre et octobre se succèdent sans résultat. Enfin demain, 16 novembre, la commission des grâces statuera sur notre sort.
Ainsi, depuis le 3 avril, à onze heures du soir, j’ai quitté ma Noémi, ma maison, ma famille, mon bien-être, tout ce que j’aimais et qui me faisait heureux ! Depuis six mois et douze jours, la plus douce des consolations m’a presque constamment manqué !
Ma Noémi, pour me sauver, s’est éloignée de moi, j’ai vécu presque seul au milieu des autres détenus ; que de regrets, si je dois mourir !...
Maintenant, je veux revenir vers ce passé terrible, irréparable, je veux jeter un regard en arrière sur cette série de faits si étrangement enchaînés entre eux et qui, du haut d’une popularité si laborieusement et si justement acquise, m’ont précipité sur les marches de l’échafaud.
Qu’ai-je fait ? Qu’ai-je voulu faire ? Suis-je coupable envers mon pays ? Mon être tout entier crie : Non ; je suis innocent.
Pour l’honneur de ma mémoire, que nul peut-être ne songera à défendre après moi ; pour l’honneur de mon nom, que je laisse à mes enfants, pur et sans tache, je dois écrire ce que j’ai fait, ce que j’ai vu, ce que j’ai su… [37]
Bibliographie et sitographie indicatives
Aubray Maxime et Michelesi Sylla, Histoire des événements de Marseille du 4 septembre 1870 au 4 avril 1871, Marseille, imp. T. Samat, 1872.
Bitton Michèle,
– Gaston
– 1871 la Commune de Marseille du drapeau rouge au bagne calédonien, Marseille, 2024.
– Mon cadeau de noces, à ma cousine Léonie Vidal, à mon cousin Esdras
– A l’Italie. Cent vers, Nîmes, Librairie Manlus Salles, 1859.
https://gallica.bnf.fr/ark :/12148/bpt6k5542463t
– Les Marseillaises. Némésis, Marseille, Imprimerie commerciale F. Canquoin, 1868. https://gallica.bnf.fr/ark :/12148/bpt6k5608615f
– Œuvres posthumes, précédées d’une lettre de Victor Hugo et d’une notice par A. Naquet député ; Paris, Dentu, 1879. https://gallica.bnf.fr/ark :/12148/bpt6k86583z
Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français initié par Jean Maitron , aujourd’hui en ligne : http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/
Outre la notice de Gaston
Rabatau Augustin et Legré Ludovic ; La ville de Marseille. L’insurrection du 23 mars 1871 et la loi du 10 vendémiaire an IV, Paris, Chamerot, 1874. 82 pages.
https://gallica.bnf.fr/ark :/12148/bpt6k54570631/f2
Vignaud Roger
– Gaston
– La Commune de Marseille. Dictionnaire, Aix-en-Provence, Édisud, 2005.
[1] Gaston Crémieux, Œuvres posthumes, précédées d’une lettre de Victor Hugo et d’une notice par A. Naquet député ; Paris, Dentu, 1879. 276 pages. Cet ouvrage a été réédité plusieurs fois à l’identique jusqu’en 1887. Une de ses éditions numérisée est consultable sur le site Gallica de la Bibliothèque nationale de France (4e édition, 1882) : https://gallica.bnf.fr/ark :/12148/bpt6k86583z
[2] Roger Vignaud, La Commune de Marseille. Dictionnaire ; Aix-en-Provence, Édisud, 2005. 195 pages.
[3] Roger Vignaud, La Commune révolutionnaire de 1871 à Marseille ; Marseille, ARRA, 2011. 373 pages.
[4] Roger Vignaud ; La Commune révolutionnaire de 1871 à Marseille, op. cit., p. 4.
[5] Gaston Crémieux, Œuvres posthumes, précédées d’une lettre de Victor Hugo et d’une notice par A. Naquet député ; Paris, Dentu, 1879. 276 pages. Cet ouvrage a été réédité plusieurs fois à l’identique jusqu’en 1887. Une de ses éditions numérisée est consultable sur le site Gallica de la Bibliothèque nationale de France (4e édition, 1882) : https://gallica.bnf.fr/ark :/12148/bpt6k86583z
[6] Roger Vignaud, La Commune de Marseille. Dictionnaire ; Aix-en-Provence, Édisud, 2005. 195 pages.
[7] Roger Vignaud, La Commune révolutionnaire de 1871 à Marseille ; Marseille, ARRA, 2011. 373 pages.
[8] Roger Vignaud ; La Commune révolutionnaire de 1871 à Marseille, op. cit., p. 4.
[9] Gaston
[10] Gaston Crémieux, Mon cadeau de noces : à ma cousine Léonie Vidal, à mon cousin Esdras Crémieux, à mon oncle Hippolyte Vidal, Nîmes, éditeurs Baldy et Roger, 1857, 8 pages. À l’Italie. Cent vers ; Nîmes, Librairie Manlus Salles, 1859, 8 pages.
[11] Gaston Crémieux, Robespierre. Le 21 janvier 1793 : Monologue en vers dédié à Alphonse Esquiros et Léon Gambetta, Marseille, imprimerie commerciale J. Doucet, 1869. 16 pages.
[12] Rimes de prison, in Œuvres posthumes de Gaston Crémieux, op. cit., pp. 47-50.
[13] Le Neuf Thermidor ou la Mort de Robespierre, in Œuvres
posthumes de Gaston Crémieux, op. cit., pp. 53-231.
[14] Mémoire des ouvriers de Marseille présenté au Préfet des Bouches-du-Rhône, M. Levert ; Marseille, imprimerie Serres, 1867. 20 pages.
[15] Jean-Louis Robert, « Ces communards de Paris et de Marseille », propos recueillis par Léo Purguette, in La Marseillaise, 2 décembre 2011. Cet article parut après le colloque « Gaston Crémieux et la Commune de Marseille » tenu à Marseille le 30 novembre 2011 dans lequel Jean-Louis Robert fut un des intervenants.
[16] Ce vers ne figure pas dans la version de ce poème publiée en 1868 dans le recueil Marseillaises. Némémis de Gaston Crémieux, op. cit., pp. 16-20, ni dans celle qui paraîtra en 1879 dans ses Œuvres posthumes, op.cit., pp. 257-262.
[17] Les vingt vers précédents ne figurent dans la version de ce poème publiée en 1879 dans les Œuvres posthumes de Gaston Crémieux, op. cit., pp. 257-262.
[19] L’Égalité, 3 décembre 1871.
[21] AD BdR 2 R 520, jugement collectif n°63, 28 juin 1871 : Affaire Crémieux et autres.
[22] Gustave Naquet (1819-1889). Journaliste et professeur à Paris, opposant à l’Empire, exilé à Londres et à Bruxelles après le coup d’État de 1851, il s’installa en 1868 à Marseille. Rapidement relâché après son arrestation du 7août 1870, il fut à nouveau arrêté le 24 mai 1871 et condamné le 6 juin 1871 à deux ans de prison ; il était alors âgé de 52 ans.
[23] « à ma Noémi », dans les Œuvres posthumes de Gaston Crémieux , op. cit., p. 47.
[24] Adolphe Crémieux (1806-1880) reviendra au gouvernement comme député du département d’Alger du 20 octobre 1872 au 7 mars 1876 et sera ensuite sénateur inamovible jusqu’à son décès à Paris quatre ans plus tard.
[25] Adolphe Crémieux (1806-1880) reviendra au gouvernement comme député du département d’Alger du 20 octobre 1872 au 7 mars 1876 et sera ensuite sénateur inamovible jusqu’à son décès à Paris quatre ans plus tard.
[26] Gaston Crémieux, Œuvres posthumes, op. cit. p.53.
[27] Les deux citations sont en exergue dans le texte original.
[28] Ils n’étaient en effet que seize à avoir été ramenés en prison après l’audience du 28 juin. Le dix-septième inculpé, Alexandre Bauche, était à l’hôpital où il était soigné pour une blessure par balle.
[29] Les deux citations sont en exergue dans le texte original.
[30] L’avocat Albert Aicard (1846-1927), ancien Bâtonnier de l’ordre des avocats au barreau de Marseille en 1865-1866, avait brillamment assuré la défense de Gaston
[31] Sur Espivent, le général qui écrasa la Commune de Marseille, voir plus haut dans Introduction aux Impressions d’un condamné à mort.
[32] Sur Gustave Naquet voir voir plus haut dans Introduction aux Impressions d’un condamné à mort.
[33] Cours Pierre-Puget aujourd’hui.
[34] Rue Francis-Davso aujourd’hui.
[35] C’est sur la place Sébastopol (qui existe toujours) qu’était dressée la guillotine pour les exécutions des condamnés à mort de droit commun ; ceux condamnés à mort par un conseil de guerre étaient fusillés.
[36] Antonio Quaranta et ses complices, Felice Nardi et Giovanni Codda, furent guillotinés place Sébastopol à Marseille le 27 janvier 1868 après avoir été jugés en 1867 par la cour d’assises des Bouches-du-Rhône à Aix-en-Provence pour vols qualifiés et assassinats (Affaire du gang des diligences).